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La petite vision d'Omar
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25 février 2016

LA LETTRE A COLETTE DU LUNDI 11 AOUT 2014

SAM_2956

LA LETTRE A COLETTE

QUI A DONC EXCLU LE NORDISTE IVOIRIEN ? DERNIERE  PARTIE

Pour clore cette série d’interventions sur l’exclusion du nordiste, nous avons pensé juste qu’il fallait présenter le tableau de la série de préjugés, d’idées toutes faites découlant d’un processus d’encrage, de stéréotype que chaque groupe ethnique a semé, entretenue, fait grandir au plus profond de lui-même pour l’extérioriser plus tard, lorsque la conjoncture, la précarité, et les différentes crises ont fait jour.

            Comment se présente le diagramme des préjugés généralement entretenus entre ivoiriens ? Il est tout simple, et depuis le berceau, nous avons tous été nourri à la mamelle de la méfiance à l’égard des autres. Et pour cause, l’on a attribué à chaque groupe ethnique un défaut. On a extrait en chacun son entité unique, pour l’identifier au groupe, à son ethnie, et à sa région. EX : On l’appelle DIKEMBE, et habite au 3ème. Il n’a aucun problème avec ses voisins, toujours jovial, souriant, salut tout le monde dans les escaliers. Mais au cours de la réunion mensuelle instaurée, DIKEMBE se présente : en réalité, je suis M. FAE  Jean, je suis guéré de Bangolo… automatiquement et pour paraphraser Shakespeare,  « Ce que nous appelons une rose (DIKEMBE) n’embaumerait plus autant sous un autre nom ». C’est un guéré, « les guéré mangent l’homme… » Les conceptions similaires, nous en avons en quantité industrielles ainsi « bété aime palabre, abourré se croit chef partout, Baoulé trie pas garçon,  yacouba ne respecte pas sa parole donnée, les abrons sont orgueilleux, les akans coupent tètes des gens pour enterrer leurs chefs, les attiés sont méchants, les lobis sont barbares, les Kroumens sont paresseux... » Comme si l’appartenance ethnique conférait automatiquement un défaut généralisé et applicable à toute la communauté. Dans ce melting pot d’idées préconçues que réserve t-on au DJOULA ?(le terme générique djoula utilisé abusivement pour designer tous les nordistes). Se sont les ESCLAVES ENVAHISSEURS : Qui n’a jamais entendu le terme «  Kangah Djoura »,  « Blinblingnoua », « Lorougnouan » ou encore « bôyôrôdjan » pour designer le nordiste ? Et dans l’autre sens, les nordistes se seront pas en reste : Bushmani (déformation de l’anglais Bushman homme des forets par opposition aux nordistes hommes de la savane), Kafri, Kôbala... pour ceux d’en face.  En tout état de cause, nous nous ironisions au plus profond de nous et rien de plus.

Formalisation de l’exclusion du nordiste :

Si le communautarisme évoqué dans le 1er chapitre a  ses inconvénients, il faut être honnête et reconnaitre qu’il a eu pour avantage la création de la quasi-totalité des centres villes, de gares routières, de commerces, brefs une véritable implantation qui a permis à plusieurs bourgades d’émerger et devenir aujourd’hui les agglomérations que nous avons. C’est cette aptitude du nordiste à se faufiler chez les autres, à s’y imposer et à prospérer qui fera dire à Paul Marty dans « Etude sur l’Islam en Côte d’Ivoire » qu’ils sont les juifs de toute la sous-région. Si cette valeur a toujours été source de méfiance silencieuse  (sans haine) de la part des autres groupes ethniques, elle sera formalisée par les intellectuelles. Dans la leçon 15 du livre d’histoire CE, utilisé dans les années 1980, on peut lire clairement ceci : les autres peuples du pays se sont installés en C.I. mais des Nordistes, on dira qu’ils sont des ENVAHISSEURS. En précisant clairement que envahisseurs signifie des ennemies qui entrent par la force dans un pays et s’y installent.

Cette formalisation de l’exclusion sera faite de manière très involontaire et sans arrière pensée par l’ancien premier ministre, lorsque dans un souci de renflouer les caisses de l’Etat, il créera des sources de revenus très discutables au début des années 90. Reprise de l’immatriculation, création de nouvelles taxes, changement de la pièce d’identité, mise au garage des journaliers de la fonction publique et au lieu de s’arrêter à ce stade, il ajoutera le pire à cet ensemble : LA CARTE DE SEJOUR. Vu le fait que le trop plein d’étrangers en Côte d’Ivoire est originaire du Mali, Burkina Faso et la Guinée, considérant que la connotation des noms est identique selon qu’on soit du nord de la C.I. ou de l’un des pays sus-cités, l’amalgame sera fait entre les nordistes et les étrangers. Disons le tout net, de même que le port de l’arme est un sujet sensible aux USA, de même que le cas des juifs est une affaire spéciale en France, la catégorisation des citoyens vivant sur le sol ivoirien serait obligatoirement cause d’harcèlement, de confusion. Cette affirmation ne souffre d’aucun doute, car le Premier Ministre Ouattara n’était pas sensé ignorer que la C.I. est un pays dont tous les habitants sont issus de l’immigration. 

A partir du milieu des 90 et jusqu’à un passé récent, on tentera de formater la société, les idées encrées et endogènes devraient pousser et donner fruits.  Certains parents, les journaux, radio TV, tout le monde s’y mettra. Au cours d’une émission TV, Tonton Bouba demandant à un enfant la définition du mot assaillant a eu une réponse et une « vraie » : les assaillants se sont les Djoula. Des émissions matinales au cours desquelles les auditeurs appelaient et insultaient, les samedis à 11 h, s’était le plateau de la xénophobie « On est Ensemble », à la Sorbonne, dans les agoras, les parlements  pire, certains iront jusqu’à accuser Houphouët de s’être associé aux envahisseurs. Voilà comment les conditions ont été crées de toutes pièces pour que les autres groupes ethniques se forgent une autre idée du nordiste, du métis, et des étrangers. Les relations furent tendues, des couples mixtes ont vu leur amour tanguer, en amphi, les « parkings étaient partagés ».  Les nordistes a travers une certaines presse donneront la réplique «  TASSOUMAN » affichant toujours a sa une : injustice pourquoi toujours les gens du nord.

Inutile de s’attarder sur les chapitres qui fâchent. Mais une chose est certaine, nous avons tous été instrumentalisés, mentis, et victimes de la voracité de ceux qui dans un élan pseudo nationaliste, économique, ou ethnocratique nous ont mis dos à dos. L’incendie de la préfecture d’Odiénné, la bastonnade du préfet et sa tenue enfilée au fou « Hèrèbè » du rond point, le mat portant le drapeau burkinabé planté à l’époque dans la cours de la préfecture de Kong et enfin la rébellion de 2002,  furent les conséquences de cette mise à l’écart. Une petite histoire pour terminer : M. Boka P…. a perdu son fils lorsque les tueries ont atteint leur summum à Port-Bouet 2. Il était en compagnie de Kanté O. Diakité M. Ils ont été brulé avec un pneu au coup. Vue la consonance des noms, chacun a une idée des probables assassins. Mais pourquoi le fils de Boka faisait parti des victimes. Simplement parce qu’en mémoire de ancien tuteur de Koudougou dans la région de Bouaflé, il a baptisé son fils Ouédraogo Karamoko Boka. Ayant vu Ouédraogo plus besoins de s’attarder sur le Boka à la fin. Combien sont t-ils ceux qui ont été « choukouyatisé » par les deux camps de cette manière ? Utilisons nos différences comme une force, au lieu de nous accrocher à une quelconque supériorité basée sur l’ethnie, le patronyme, la région... Toutes les conséquences d’une hypothétique exclusion doivent nous servir de leçon.

S’était là notre part. D’autres écrits infirmeront éventuellement ces propos issus de cette trilogie. Bon début de semaine. 

 

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