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La petite vision d'Omar
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14 novembre 2019

Marcel Etté, le SYNARES et Houphouet Boigny dans le tourbillon de 1990 (Dernière partie)

 

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- Tentative de division du SYNARES

- Les effets des décisions de la reforme d’octobre 90

- Le siège de la cité universitaire de Yopougon les 17 et 18 mai par les éléments de l’ex-FIRPAC

- Assassinat de Thierry Zébié Zirignon

...Quant au SYNARES, il est dans le viseur du pouvoir. IL faut rappeler que Marcel ETTE avait été maintenu à la tête du SYNARES de 1986 à 1990, sans élection en 1988 à cause de la situation exceptionnelle. Contre toute attente, fin novembre 1990, des membres du SYNARES exigeront une assemblée générale extraordinaire. Dans le PV de réunion rédigé ce jour-là par maitre Aliou Sibi, M. Niamkey Koffi n’ira pas avec le dos de la cuillère. Il dénoncera le caractère inopérant des actions de Marcel ETTE, ainsi que leur collusion visant à paralyser le syndicat, face à cette situation, il apparait dès lors juste que la base qui leur a donné mandat est en droit de le lui retirer. C’est au cours de cette rencontre qui s’est tenue à l’ENS, qu’un comité ah doc a été créé. Il comprend : Constant Roux, Ouattara Lassina, Diomandé Mamadou, Niamkey Koffi, Brou Kouakou, Kouamé Joseph, Ahoussou N’goran, Konan Annabelle, Yao Paul. Ce groupe qui se disait apolitique sera trahi le 25 novembre, lorsque « Fraternité Matin » le gros tam-tam du PDCI et de Houphouët affichera à sa une : ETTE Marcel destitué. La veille, Ivoir-Soir, sœur jumelle de Frat-mat avait ouvert ses colonnes au docteur Roux Constant pour une attaque en règle contre ETTE Marcel. Tout le monde comprendra alors, qu’il était manipulé par le pourvoir PDCI

 

Un mois avant ces deux évènements, de nouvelles reformes avaient été annoncées au niveau de l’enseignement : dissolution de la MEECI, suppression de la commission d’orientation et instauration d’une année propédeutique, instauration des UV, décision de création de 2 nouvelles universités, L’ENS deviendra désormais un concours, suppression des internats et de la gratuité des transports pour les étudiants, enfin les parents devront désormais participer aux frais de scolarité.
Dans la foulée, le 28 octobre 90, eut lieu la première élection présidentielle multipartite entre Laurent Gbgabo et Houphouet. Gbagbo s’en sortira avec18,3%, le vieux aura 83,7.

 

La branche du SYNARES fidèle à Marcel ETTE organisera la riposte face aux dissidents. Comme indiqué dans l’article 23 des textes régissant le syndicat, ce ne sont pas les 2/3 des sections qui ont participé à la réunion extraordinaire, mieux seules les sections ont droit de vote et non une poignée de membres, enfin aucune disposition de l’article 34 n’a été prise en compte. Constant Roux, Niamkey Koffi… seront qualifiés de groupuscule avide de promotion politique manipulé par le PDCI qui d’ailleurs leur a donné les moyens de contrôle sur les comptes du syndicat. La tendance Roux du SYNARES attentera un procès contre l’équipe ETTE. Leur plainte sera invalidée. Marcel ETTE constata que les « rebelles » s’étaient appuyés sur les enseignants des grandes écoles en quête de promotion. Il jettera son dévolu sur les enseignants chercheurs, mieux il ajoutera désormais à ses revendications des problèmes de nature variée autres qu’académiques. ILS auront le soutien de USD, PIT, FPI, PSI, SYNESCI tendance Pierre Kipré, la FESCI, la LIDHO de René Dégny Séguy… Finalement, l’échec juridique des « rebelles » sera constaté.

 

Tentative de division du SYNARES, FESCI probablement infiltrée, c’est dans cette situation de méfiance généralisée que la rentrée scolaire 90-91 en Côte d’Ivoire aura lieu en janvier. Et quelle année scolaire ! Malgré les appels à l’union et à la cohésion syndicale prônée, Trois évènements imprévisibles allaient mettre le feu au poudre.

Les effets des décisions de la reforme d’octobre 90, le siège de la cité universitaire de Yopougon les 17 et 18 mai par les éléments de l’ex-FIRPAC, assassinat de Thierry Zébié Zirignon...

 

1- Les effets des décisions de la reforme d’octobre 90

Comme proposé par le secrétaire général du SYNARES Etté Marcel, l’année scolaire et universitaire 1990-91 commence effectivement en janvier. L’Etat procèdera à une répartition des bacheliers selon les résolutions du congrès d’octobre 90. Ainsi, après avoir étudié les 6600 dossiers d’admis au bac, 2840 ont été admis à l’université, 500 dirigés vers l’ENS, 140 à l’ENSEA, et les autres à l’INJS et au CAFOP. Cette répartition aura pour conséquences des grognes localisées de part et d’autre. La pilule passera difficilement pour les orientés cependant, ils ne pourront bénéficier pleinement du soutien des syndicats dans la mesure où le gros du problème était ailleurs.

 

2- Le siège de la cité universitaire de Yopougon les 17 et 18 mai par les éléments de l’ex-FIRPAC

 

Le 15 mai 91, alors que la FESCI tient un meeting pour exiger la libération de ses membres arrêtés fin 90, un groupe de loubards issus de la mutation de l’ex-MEECI fait irruption et saccage tout. 48 heures plus tard, la FIRPAC intervient sur la cité universitaire de Yopougon. On dénombre plusieurs victimes. Surtout des cas de viols et des disparitions. Selon plusieurs témoins vivants encore de ces évènements, il s’agissait pour le gouvernement d’alors de réduire définitivement en silence les étudiants. Le SYNARES par la voix de son SG fera une déclaration énergique et exigera une enquête indépendante. En guise de soutien aux étudiants, Marcel ETTE profitera pour relancer de 72 heures la grève. Le 22 mai, Emile Constant Bombet intervenant au JT félicitera l’armée nationale tout en récusant toutes les accusations. Choqué par les propos du ministre, Pierre Kipré et le SYNESCI entreront aussi en grève. La commission d’enquête exigée, mise sur pied et dirigée par M. Camille Hoguié a établi clairement l’implication directe du colonel Robert Guéi et de plusieurs officiers d’alors dans cette intervention criminelle. Houphouët n’osera lever le petit doigt pour condamner ces évènements graves. Toutes les structures affiliées au SYNARES se retrouveront le 15 juin 1991 pour désamorcer la situation. C’est au cours de la réunion finale que la décision de reprise sera programmée pour le lendemain.

 

3- 17 juin, assassinat de Thierry Zébié Zirignon

 

Quelques heures après cette programmation, la FESCI organisera un meeting sur le campus. Ce meeting était préparatoire au premier grand meeting de la FESCI à la cité Mermoz investie depuis le début de la crise par des individus qualifiés de loubards à la solde du gouvernement. Si la plupart des têtes de file de la FESCI, Blé Guirao, Ahipaud et les patrons du SYNARES… ont juré la main sur le cœur qu’ils ne savaient absolument rien de ce qui « pouvait être prémédité », la quasi-totalité des apprenants qui arpentaient chaque jour la colline « Dien Bien Phu » savait que le « Koweit » (en hommage à l’actualité guerre du Golf) devait être libéré ce jour. Martial Ahipaud, voyant le drame qui à venir, allongera au maximum le meeting préparatoire jusqu’à 2h de temps (selon ses propres termes) la foule n’en pouvant plus fut obligée de laisser le SG continuer seul son meeting pour attaquer la colline reliant Mermoz à Cocody. Elle est accueillie par des sons de casseroles tapées avec des cuillères par les filles. Ladite foule se retrouvera nez à nez avec le chef de file des loubards, un certain Zirignon Zebié Thierry. Il était assis au kiosque, un endroit bien connu des éléments de la FESCI. Il tentera de s’échapper avec trois de ses hommes. Malheureusement, il se refugiera dans la cuisine d’une famille voisine à la cité. C’est là que son agonie commencera après avoir reçu un coup de brique dans la tête. Il sera ensuite livré à la foule pour être achevé. La mort de Zébié sera condamnée par la FESCI, le SYNESCI, le SYNARES et le gouvernement Ouattara, le gouvernement accusera la FESCI d’être responsable de sa mort. La FESCI affirmera que la mort de Zébié a été commanditée par le gouvernement Ouattara pour trouver une raison incontestable à sa dissolution. Et croyant qu’il suffisait juste de prononcer le mot dissolution sur les antennes que la Fédération disparaitrait, le premier ministre Alassane Ouattara apparaitra effectivement le 20 juin 1991 pour annoncer la dissolution de la FESCI, et la « réquisition » des tous les enseignants grévistes, la radiation de tous les étudiants récalcitrants. Comme qu’ils n’attendaient que l’intervention du premier ministre, les membres de la FESCI et le SYNARES radicaliseront la lutte. Du côté de la FESCI, c’est le début de la clandestinité et l’apparition des « Jah-Gunt » (lance-pierre) sur les campus. Marcel ETTE et Pierre KIPRE lanceront le lendemain un mot d’ordre de grève illimité au niveau de l’enseignement supérieur. Avec des revendications impossibles à traiter :

 

- Démantèlement du réseau des loubards

- Retrait des forces de l’ordre sur le campus

- Levée de l’interdiction de la FESCI

- Démission du recteur

- Démission du directeur du CNOU

- Démission du ministre de l’éducation national

- Démission du ministre de la recherche scientifique

- Démission de Emile Constant Bombet

- Démission de Robert Guei

En partie un pan de la vie syndicale d’un homme, mis en rapport avec une époque et une succession d’événements. Il est impossible de dissocier son parcours de notre histoire récente. On se demande souvent s’il a eu une vie à part se cacher, travailler dans la clandestinité et réfléchir à la gestion de sa base. Bref, il y’a des hommes qui ne font pas de bruits, qui se ne tapent pas la poitrine, qui d’ailleurs n’ont laissé aucune trace écrite. Pourtant, ils ont posé les sillons de la démocratie dans laquelle nous sommes aujourd’hui. Nous ne l’avons pas connu. Cependant lorsque nous étions au lycée, son nom revenait constamment sur les lèvres de nos maitres. MARCEL ETTE

 

Documents consultés :

- Felix Houphouët Boigny la fin et la suite, Fréderic Mel GRAH

- Passion Scolaire en Côte d’Ivoire, Laurence Prauteau

- QUID 1994

- La Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo

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