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La petite vision d'Omar
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14 novembre 2019

Marcel Etté, le SYNARES et Houphouet Boigny dans le tourbillon de 1990

 

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- Légalisation du FPI

- Déclaration de l'année blanche

- La FESCI

A partir de 1988, la grogne sort des classes et des amphis pour devenir progressivement nationale. La corruption, la gabegie, le vol au sommet de l’Etat a rendu la Côte d’Ivoire insolvable, Houphouët, dans un élan de solidarité envers ses collaborateurs dira qu’on ne regarde pas dans la bouche de celui qui grille des arachides. La vision rigoureuse dans la gestion prônée depuis 1981 a conduit au blocage des salaires, à la réduction dans le recrutement au niveau de la fonction publique, à la chute des avantages de plusieurs catégories de fonctionnaires. Cette situation calamiteuse sera une aubaine dont se saisiront les opposants naissants à travers des tracts. Parmi celles-là nous relèveront deux dont nous avons encore copie :

 

- Le premier, c’est la liste des milliardaires en francs français inconnus du grand public : selon les auteurs de ce document, 10% de la population détient 85% des richesses nationales : Houphouet Boigny 66 milliards, Angoua Koffi DG des douanes 2,6, Konan Bedié 2,3, Bra Kanon 1,4 ; Jean Michel Moulot, 0,5, Mathieu Ekra 1… cette information a été reprise dans le QUID 91 (Google de notre enfance) dont nous avons encore un exemplaire

-

- Le second tract porte sur le manque de confiance entre Houphouët et les fonctionnaires ivoiriens, et la mainmise de la France. Le président est en effet entouré que de collaborateurs français : le directeur de cabinet, Guy Nairay, la secrétaire s’appelle madame Plazaney, son premier conseiller est Alain Belkiry.

-

- Puis quelques chapitres révoltants du prochain livre « liberté confisquée » d’un certains Bernard Doza

-

Informé de tout ce qui se tramait, Houphouët jugera bon de convoquer dans la dernière semaine de septembre 1989, un conseil national. Il insistera surtout pour qu’autour de la table du conseil, tous les syndicats soient présents, et singulièrement celui des enseignants. La presse nationale donnera très peu de détails sur le contenu et la qualité des intervenants au cours de la rencontre qui a duré une semaine. Cependant, tous s’accordent pour reconnaitre que le plus courageux face au « vieux » fut Marcel Etté, le secrétaire du SYNARES. Dans une brève intervention, il expliquera à Houphouët que le débat avait dépassé le cadre des revendications ici et là. Les seules choses à faire étaient les suivantes :

- Surseoir à la mesure de réduction des salaires

- Revoir totalement la stratégie de répartition des richesses

- Enfin, l’application de l’article 7 de la constitution en instaurant le multipartisme en Côte d’Ivoire.

-

Rejetant en bloc toutes les propositions de M. Etté Marcel, Houphouët étudiera avec son ministre du budget Koumoué Koffi, les niveaux de réduction des salaires. Ce dernier apparaitra d’ailleurs tout nerveux sur les antennes de la RTI le 3 février 1990 pour annoncer les modalités de réduction des salaires allant de 10 à 44% ou 46% selon une certaine presse. Alors que les forces de l’ordre avaient été mises en alerte maximum pour parer à toute éventualité, M. Etté Marcel donnera des consignes fermes à ses camarades : rester calme et ne considérer que les mots d’ordre venant des AG. Houphouët en fin tacticien était en contact permanent avec tous les leaders des syndicats. Malheureusement le premier couac viendra de là où le vieux s’y attendait le moins.

 

Le 19 février 1990, à la cité universitaire de Yopougon, en pleine période de préparation des examens, une nouvelle coupure d’électricité allait mettre le feu au poudre. Les étudiants prendront la rue toute la nuit en déchirant le drapeau vert-blanc du PDCI. Plusieurs engins seront calcinés et l’occasion sera toute trouvée par les étudiants pour dénoncer la MEECI, et les loubards du PDCI sur la cité. « A l’arrivée du ministre sur la cité tard dans la nuit, les propos qu’il a entendu étaient au-delà des problèmes ordinaires d’étudiants. « Surpris pas la situation il (le ministre) a cru bon de rappeler la police pour nous charger. C’est alors que nous avons ajouté aux revendications la démission du ministre » propos de Eugène Kouadio Djué en 1992. Suite à l’arrestation de 130 étudiants, Marcel Etté soutiendra les étudiants. Ce soutien était d’autant plus juste que deux jours après ces événements, le recteur de l’université Tio Touré Bakary avait souhaité s’entretenir avec les porte-paroles des étudiants. Cette rencontre s’est soldée par une intervention plus brutale. Moins d’une semaine plus tard, tous les étudiants seront libérés pour une recherche de solution et reprise des cours. Ces libérations durciront au contraire la lutte et dans la mêlée, Alassane Salif N’diaye entrera au gouvernement le 28 février. De manifestations d’étudiants pro-PDCI (MEECI) en contre-manifestations des autres tendances soutenues par le SYNARES de ETTE Marcel, de propos acerbes d’enseignants opposés les uns aux autres, le mois de mars sera le plus difficile pour Houphouët dans sa gestion du monde scolaire. Le chaos sera généralisé. Pendant deux semaines « le vieux » tentera de renouer le contact avec tous les acteurs pour sauver le peu qui pouvait l’être au niveau des meubles. Hélas, le bateau du système scolaire était trop près de l’iceberg pour tenter un à gauche tout

 

Le moment était très beau pour ne pas en profiter du côté du FPI. Le 2 avril 90, Laurent Gbagbo, Agodio Paul et Emile Boga Doudou se rende à la préfecture d’Abidjan pour le dépôt du statut et règlement intérieur d’un parti qu’il souhaiterait dénommer FPI. Pris de panique (selon les termes de GBAGBO), le secrétaire général de la préfecture leur dira d’attendre le lendemain, le préfet en personne pour être reçu.

 

Le 3 avril, sous le numéro 128 du 3 avril 1990, le préfet Gohi Bi enregistrera le dossier déposé par Laurent Gbagbo. Le soir, Gbagbo et ses camarades inonderont les chaines de radios étrangères pour annoncer urbi et orbi la bonne nouvelle. Dans les heures suivantes, 8 autres partis leur emboiteront le pas.

 

Le 7 avril 1990, l’année sera déclarée blanche sur toute l’étendue du territoire national. Marcel ETTE, In limine litis s’y opposera en évoquant les conséquences désastreuses pour les apprenants, le système scolaire, pour l’économie, pour le pays. L’AFI (Association des Femmes Ivoiriennes), et plusieurs structures exhorteront le vieux à revenir sur sa décision.

 

Le 13 avril 1990, sous la plume de Robert Minangoy, le journal Le Monde affirme que Houphouet Boigny quittera le pouvoir en mai prochain. D’ailleurs, son successeur Konan Bedié avait déjà été intronisé selon les traditions Akan. La même information avait été donnée par Lettres d’Afrique du mercredi 11 avril 1990.

 

Dans la foulée des évènements de la cité de Yop et du campus de Cocody, plusieurs structures estudiantines en l’occurrence l’Organisation nationale des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (ONEECI) de Eugène Djué; de la Conscience estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (CESCOCI) de Mampo Gérard et Ahipaud Martial ; de l’Union des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (UEECI) de Kadio Appia André ; du Syndicat des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (SEECI) de Clément Gogoua et de l’Union nationale des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (UNEECI) dirigée par Bandama ces organisations fusionneront à l’Église Sainte famille de la Riviera pour donner le 21 avril 1990 la FESCI.

 

Le 30 avril 1990, le bureau politique du PDCI opte pour le retour du multipartisme. Retour au calme dans le pays. Le « Vieux » pouvait enfin souffler un bon coup.

 

La fermeture de l’école et des cités a été une aubaine pour le vieux de dispatcher les enseignants et apprenants. Le SYNARES, LA FESCI, le FPI n’auront que les tracts pour remobiliser leur troupe. Houphouet et le PDCI, jouissant de la RTI, de Fraternité Hebdo et de Fraternité Matin, trois « gros tam-tam au son monocorde et inoffensif » soumettront les ivoiriens à un matraquage psychologique. Défilé de plusieurs centaines d’enseignants, des paysans, des étudiants (MEECI), pour demander pardon à « Nanan ». Pendant tout ce temps, Marcel ETTE expliquera à Houphouët que le folklore ne résoudra rien. Il fallait automatiquement ouvrir les écoles et les cités. Le « vieux » restera ferme sur sa position. « L’année 89-90 est et restera blanche et sera reprise en Octobre 90 » telle sera la réponse d’Houphouët. ETTE Marcel reviendra à la charge pour expliquer au président que l’année 90 pouvait toujours être sauvée en 4 mois et recommencé 90-91 en Janvier 91. A l’analyse, il était possible de sauver l’année. Cependant, une seule idée trottait dans la tête du vieux et sa famille, l’inauguration pacifique de la basilique par le pape prévu les 9 et 10 septembre 1990. Qu’à cela ne tienne, la réouverture de l’école sera d’abord programmée le 12 septembre, et finalement reportée au 25 septembre 1990. Ahipaud Martial et la FESCI s’opposeront farouchement à cette reprise et feront circuler des tracts dans toutes les villes « … Ni la CESCOCI, ni la FESCI n’ont donné un avis favorable à la reprise (…) non à une reprise, et oui à une nouvelle année… ». La reprise sera émaillée de violence, l’université deviendra un vrai camp militaire, le pouvoir profitera alors pour régler ses comptes et diviser pour mieux régner.

 

48 étudiants seront arrêtés et radiés, parmi ceux-ci Ahipeaud Martial qui d’ailleurs ira en exil, il sera remplacé par Eugène Djué. Djué sera soupçonné d’être une taupe de Bédié au sein de la FESCI, le tabouret lui sera arraché au profit de Blé Guirao….

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